22 - Jean-Marc Daniel sur BFMTV utilise de manière inepte le concept de zemblanité.

Jean-Marc Daniel, le 6 décembre 2017 dans l'émission BFMBusiness, illustre la sérendipité et utilise de manière inepte le concept de zemblanité pour chanter les louanges de l'ultra-libéralisme.


(la vidéo n'est plus en ligne, j'ai donc supprimé le lien. Heureusement que j'en avais fait la transcription pour les malentendants. Vous trouverez l'intégrale en fin d'article).

Autant ses illustrations de la sérendipité sont pertinentes, autant celles sur la zemblanité n'ont rien à voir avec la définition donnée par William Boyd.
En effet il prend l'exemple de la recherche dans le cadre d'une autorité universitaire. Ces chercheurs trouvent des choses sans utilité sociale ni économique :

"La zemblanité c'est (sic !) des gens qui font des découvertes dans un cadre qui a été défini par une autorité politique universitaire et donc qui vont trouver quelque chose dont l'utilité sociale et économique n'est jamais confirmée"
En quoi ces recherches sont volontairement malheureuses, malchanceuses ?
Au pire elles sont inutiles.

Il utilise donc le concept de zemblanité de manière inappropriée pour défendre une position ultra libérale : la recherche universitaire ne sert à rien.

Position confirmée par le journaliste et sa réponse :

Journaliste : La politique industrielle, notre industrie de recherche, les 34 projets industriels de la France sont, j'en ai peur, plus proche de la zemblanité que de la sérendipité ?
Jean-Marc Daniel : je le crains ... oui ...

Pour lui les 34 projets industriels de la France sont du domaine de la zemblanité. Ils aboutirons à des résultats volontairement malheureux, malchanceux si l'ont prend la définition de William Boyd ou à rien, si l'on prend son erreur du sens de zemblanité.

Le deuxième exemple donné est la recherche en URSS pour la conquête de l'espace.

On arrive à des résultats ... l'exemple que l'on prend accessoirement c'est la conquête spatiale par les soviétiques. Il y avait un objectif politique qui était de s'affirmer par rapport aux Américains, donc ils ont mis le paquet, ils y sont arrivés. Puis une fois qu'ils ont eu envoyé leur satellite ... c'en est resté là ...  à quoi ça sert ... on est passé à autre chose.

Ici non plus, rien à voir avec la zemblanité. D'autant plus que les recherches spatiales en URSS ont permis le lancement des satellites, en particulier de communication et les stations spatiales.
Il aurait pu parler des fusées chargées de têtes nucléaires pour se rapprocher du concept de zemblanité

Il se sert donc de la "magie de la zemblanité" (1) pour faire passer un message idéologique. Cet exemple est très intéressant pour illustrer l'utilisation du langage savant, même inapproprié, pour impressionner l'auditoire et détourner son attention de la question essentielle : la justesse ou la fausseté de l'analyse.

En conclusion, comme Alain Peyrefitte qui n'avait pas compris le sens de sérendipité, Jean-Marc Daniel n'a pas compris celui de zemblanité.

Pour lui la sérendipité n'existe pas dans le domaine de la recherche universitaire ... très curieux !
Dans ce domaine ne régnerait que la zemblanité à la sauce J-M Daniel ;-)

Marie Curie doit se retourner dans sa tombe ;-)

Le dogme ultra-libéral aveuglerait-il ? ;-)

Et avec Camus, je dirais : "mal nommer les choses ajoute à la misère du monde" ;-)

(1) Marie-Anne Paveau a écrit que c'est "la magie de la sérendipité" qui a permis la création de la zemblanité.

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Transcription pour les malentendants de la chronique de Jean-Jacques Daniel dans la cadre de l'émission BFMBusiness sur BFMTV .

Journaliste de BFMTV :
C'est l'heure de prendre un petit cours d'innovation autour de deux termes : sérendipité et zemblanité, racontez-nous.

Jean-Marc Daniel : 
Alors que veulent dire ces deux mots.
Sérendipité c'est un mot qui a été inventé au XVIIème siècle par les Anglais à partir d'un conte raconté par un écrivain qui s'appelle Horace Walpole et il s'inspire ... (alors à l'époque on s'inspire beaucoup de l'Orient, c'est l'époque où Voltaire écrit Zadig et tout ça) ... et il va prendre des gens qui voyagent à partir de Serendip qui est le nom persan de Ceylan ... Il ne veut pas prendre le nom de Ceylan ...
Dans son histoire ces trois voyageurs réussissent à découvrir le chameau alors qu'ils ne l'avaient pas imaginé, mais pas en voyant un chameau, par un certain nombre d'indices qui leur permettent de dire ... il y a derrière un animal qui n'est pas comme les autres, qu'est-ce c'est que cet animal et leur curiosité étant attiré par ces indices va leur permettre de découvrir quelque chose qu'ils n'avaient pas découvert ... qu'ils n'avaient pas pensé découvrir auparavant.

Et donc la sérendipité, que les québequois traduisent par fortuité, qui est un mot qui veut dire assez bien ce que ça veut dire en Français, c'est la capacité à saisir les opportunités quand on fait de la recherche scientifique et à prendre des produits, des idées que l'on n'avait pas au départ de ces travaux, c'est de rebondir sur des trouvailles qui sont des trouvailles qui n'étaient pas prévues initialement.

Journaliste : 
On ne trouve pas ce qu'on cherche ?

J-M Daniel : on ne trouve pas ce qu'on cherche et on a une capacité à rebondir immédiatement sur ce qu'on trouve en disant, mais ça, même si c'est pas ça qu'on cherche ça peut être utile dans le développement ... de l'entreprise ... de ...

Journaliste :
Et par définition la vraie innovation de rupture révolutionnaire ?

J-M Daniel :
On ne pouvait pas la chercher on ne savait pas que cela existait.

La Sérendipité c'est d'avoir la capacité à innover dans des domaines qu'on ne connait pas à priori, alors des exemples très célèbres ...

Journaliste :
... j'aime beaucoup le post it ...

Il y a le post-it.  On est chez 3M. Un des chercheurs de 3M reçoit des échantillons de colles et il y a beaucoup sur son bureau et le service de nettoyage lui dit : écoutez, il faut évacuer tout ça ...
Le service de nettoyage est parti et pour simplifier la tâche du service de nettoyage il prend tous les échantillons, il mélange tout ça dans une seule bouteille pour que le lendemain le service de nettoyage puisse récupérer la bouteille en question.

Et quand il revient le lendemain il s'aperçoit que la couleur de ce qu'il a mis dans la bouteille en question a changé donc il pense qu'il s'est passé quelque chose sur le plan chimique.
Il regarde le nouveau produit qu'il a et il a une nouvelle forme de colle qu'il va pouvoir utiliser pour faire le post-it ... et donc cette capacité à ... sérendipité ...

Journaliste :
Ça s'oppose à la zemblanité ?

JM Daniel :
La zemblanité c'est (sic !) des gens qui font des découvertes dans un cadre qui a été défini par une autorité politique universitaire et donc qui vont trouver quelque chose dont l'utilité après sociale et économique n'est jamais confirmée.

Journaliste :
Quand on  reste dans sa voie de recherche on est déçu ?

JM Daniel : 
On arrive à des résultats ... l'exemple que l'on prend accessoirement c'est la conquête spatiale par les soviétiques. Il y avait un objectif politique qui était de s'affirmer par rapport aux Américains, donc ils ont mis le paquet, ils y sont arrivés.
Puis une fois qu'ils ont eu envoyé leur satellite ... s'en est resté là ...  à quoi ça sert ... on est passé à autre chose.

La sérendipité ça concerne tout un tas de domaines c'est à dire, ça va de la tarte tatin qui est en sérendipité ... c'est à dire des gens qui font une erreur ... au post-it ... jusqu'à des découvertes en physique fondamentale.

Journaliste :
 La politique industrielle, notre industrie de recherche, les 34 projets industriels de France sont, j'en ai peur, plus proche de la zemblanité que de la sérendipité ?

Jean-Marc Daniel : je le crains ... oui ...

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