5 - Zemblanité et Sciences de l'Éducation

Les concepts de zemblanité et de sérendipité sont intéressants dans le domaine de la pédagogie et de la didactique car ils illustrent les principes d'association d'un concept, d'une idée, à une représentation physique ou imagée.
C'est un moyen mnémotechnique qui a été utilisé notamment par Roger-Henri Bordesoules dans sa méthode de lecture "Comment vaincre la dyslexie". 
En effet, il donne du sens aux mots et syllabes de la langue française qui n'ont bien sûr aucun rapport avec la chose décrite. 
C'est l'inverse des hiéroglyphes qui associent sens et représentations.
Par exemple pour lire et écrire correctement le mot cobra il dessine un serpent et intègre c o dans les yeux du cobra. Il raconte aussi une histoire sur le cobra qui stimule l'imaginaire et favorise la mémorisation. Les enfants atteints de dyslexie, ou supposés l'être, n'inversent plus les syllabes et les lettres, ne prononce plus sobra ni ocbra mais cobra car il ont associé la syllabe co au serpent. En effet ces enfants, qui ne manquent pas d'intelligence, se rebellent contre l'arbitraire, ou l'absence de sens, de l'écriture. Pour réussir à leur donner goût à la lecture, on rend "magique" les syllabes et les mots, on repasse par l'étape des hiéroglyphes, par l'étape de l'image.
Nous sommes dans ce que Marie-Anne Paveau appelle "la magie" d'un concept.
Il est donc facile de faire comprendre le concept de zemblanité, même de manière précoce, en décrivant la Nouvelle Zemble, comme une terre inhospitalière, de roches et de glace, lieu d'expérimentations nucléaires et qui en garde les contaminations.

Zemblanité (zemblanity) : les îles de la Nouvelle Zemble sous le feu nucléaire


Cela sera d'autant plus facile qu'on l'opposera à la sérendipité et son île à la nature accueillante et luxuriante.

Sérendipité (serendipity) : l'île de Sérendip (Shri Lanka)

Marie-Anne Paveau, dans la préface de la réédition des ''Aventures des trois princes de Serendip suivi de Voyage en Sérendipité''(1) considère que la "création du concept de zemblanité par William Boyd est due à "la magie de la sérendipité", on pourrait ajouter, sa puissance évocatrice.

À son tour, la zemblanité, bénéficie de cette magie, mais "magie noire" ;-) dans ce cas.

Cette analyse de Marie-Anne Paveau est tout à fait pertinente car William Boyd dans son roman nous dit aussi :
- C'est ça. Croyez-vous à la sérendipité, au don de faire par hasard des découvertes heureuses, monsieur Black ? 
- "Pas vraiment."
Il croyait en son contraire, quel qu'en fut le nom.
"C'est la plus puissante des forces dans la vie de quiconque. Ça l'est dans la mienne.(2)
William Boyd maîtrise parfaitement les deux concepts opposés, de création britannique, ce qui n'est hélas pas le cas dans les écrits et les communications en France ou en langue française. Voir les pages sur Alain Peyreffite, Jean-Marc Daniel, Eva Sandri ... : la magie vire au glissement sémantique !


(1) ''Les Aventures des trois Princes de Serendip, Suivi de Voyage en Sérendipité'' par Louis De Mailly, Édition Thierry Marchaisse, 2011, préface de Marie-Anne Paveau. Linguiste, professeur à l'Université Paris 13. Elle a publié plusieurs ouvrages et une centaine d'articles dans le domaine de l'analyse du discours, de la didactique du Français, de l'histoire et de l’épistémologie de la linguistique. Ses recherches portent sur la dimension morale du discours et sur les nouvelles configuration langagières dans les univers numériques. 
(2) page 228 de l'édition française, point Seuil 1999.

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